Éclats de rose et de plastique: la vérité/tromperie dans la photographie de Belin et Mosse
Éclats de rose et de plastique: la vérité/tromperie dans la photographie de Belin et Mosse
L’outil pédagogique Mouvements: Mosse/Belin est conçu par l'équipe de DHC/ART Éducation afin d'encourager les visiteurs à développer en profondeur certains concepts clés explorés par les expositions Surface Tension de Valérie Belin et The Enclave de Richard Mosse. Ces concepts sont la vérité/tromperie, le corps, le médium, la pellicule. Cette semaine nous présentons le premier essai de la serie qui explore la notion de vérité/tromperie.
La photographie est fondamentalement un médium hybride. À la fois science et forme d'art, elle porte en elle vérité et tromperie. Valérie Belin et Richard Mosse ne cherchent pas à représenter le monde de façon objective: leurs photographies sont empreintes de leur signature tactile, de l'interprétation du spectateur et de la conscience de soi des sujets. En questionnant l'esthétique de leurs photographies, cette réalité hybride de vérité et de tromperie se charge de sens.
Belin et Mosse explorent tous deux une esthétique profondément ambiguë; celle-ci est belle et séduisante, mais d'une façon troublante, artificielle, excessive. Tellement de rose, tellement de plastique. Belin choisit ses sujets en fonction de leur potentiel photogénique. Elle affirme être intéressée à sonder et à découvrir les vérités de ses objets.[1] Et pourtant, ses Corbeilles de fruits ont été vaporisées avec les effets anti-mûrissement de l'artifice : le fruit est là pour être admiré, non pas consommé, il semble être fait de plastique, quoiqu'il soit bien réel. En revanche, ses Mannequins, vraiment composés de matière plastique, irradient, semblent ainsi s'animer, prendre vie. Quelle est la vérité du fruit? Celle des mannequins?
Les choix esthétiques de Mosse mettent aussi au défi les notions de vérité et de tromperie en transformant le conflit au Congo - souvent caché - en un océan de rose. L'artiste remet en question la photographie noir et blanc, en demandant pourquoi celle-ci serait plus près de la Vérité que la photographie couleur rose. [2] Le noir, le blanc et le rose ne sont, après tout, que des couleurs. À ce sujet, il affirme que "le naturalisme ne possède pas plus l'apanage de la véracité que les autres stratégies" et que sa décision d'utiliser la pellicule infrarouge Aerochrome est une décision créative de la même manière qu'un autre artiste peut choisir d'utiliser les outils numériques, aucune option n'est plus véridique que l'autre.
Au coeur des effets de rose et de plastique, la vérité et la tromperie sont constamment entrelâcées.
Pour une examination plus approfondie:
1. Est-ce que les choix esthétiques des deux artistes (l'utilisation par Mosse de la pellicule infrarouge Aerochrome, la façon qu'a Belin de rendre le réel irréel et l'irréel réel) ont pour effet d'entraîner le spectateur dans une zone de leurre? De quelle façon la vérité peut-elle être interprétée dans leur travail?
2. La photographie a-t-elle la capacité de capturer une vérité, ou est-ce que l'image est nécessairement une certaine version de la réalité?
[1] Jerome de Noirmont, Art & Confrontation. Internet. 18 Sept. 2014. .
[2] Joerg Colberg, Conscientious Extended: A Conversation with Richard Mosse, Sept 21, 2010. Internet. 18 Sept. 2014.